Ice Lake : enfin du bon gaming sur un ultra-portable ?

La gamme de CPU Ice Lake d’Intel s’apprête à embarquer dans les ultra-portables. Dix nanomètres, refonte de la micro-architecture et circuit graphique digne de ce nom : les nouveautés sont prometteuses.

© Intel Corporation

Intel a « brisé la glace » : depuis début août, les processeurs Ice Lake, prévus pour les ultra-portables, sont officiellement livrés aux partenaires, à savoir les fabricants d’ordinateurs. C’est à l’IFA 2019 que les premières machines équipées ont été dévoilées, par Acer (Swift 3/5), Razer (Blade Stealth 13) et Dell (XPS 13) notamment. Elles seront commercialisées d’ici à quelques semaines. Concernant les futurs MacBook d’Apple, ce ne serait pas avant l’année prochaine.

Cette dixième génération des CPU Core était attendue pour une seule raison : elle rompt avec les générations précédentes, qui ont enchaîné les optimisations du même cœur Skylake depuis 2015. Ce changement est principalement dû à l’introduction d’un procédé de gravure à 10 nanomètres. Une première pour Intel qui s’est débattu pour parvenir à ce stade technologique et industriel, tandis que le concurrent AMD, par l’entremise du fondeur TSMC, prenait les devants avec le 7 nanomètres, adopté en 2018.

La gamme Ice Lake compte pour le moment 11 références et vise les ultra-portables. L’enveloppe thermique est variable – 15/25 watts pour série U, 9/12 watts – selon le compromis entre autonomie, puissance et prix désiré par le fabricant.

Pour rappel, le processus de fabrication à 14 nanomètres avait été inauguré par Intel début 2015, au lancement de la gamme Core Broadwell. Entre parenthèses, il reste en vigueur pour l’autre actualité d’Intel, Comet Lake. Cette remise à niveau de la génération Coffee Lake serait davantage conçue pour les applications multitâches, grâce à l’appoint des six cœurs à 4,9 GHz (dans le meilleur des cas). Ces CPU appartiennent bien à la dixième génération, néanmoins, et sont désignés par une nomenclature similaire à celle d’Ice Lake… Merci par avance, Intel, de nous embrouiller l’esprit à ce point.

Tout augmente, sauf les fréquences

Revenons à Ice Lake et à ses principales innovations. Pour tirer meilleur profit du passage au 10 nanomètres, la micro-architecture Sunny Cove succède à Skylake.

La taille du cache L1 passe de 32 Ko à 48 Ko, la taille du cache L2 est doublée (512 Ko contre 256 Ko) et, surtout, le nombre d’instructions par cycle progresserait en moyenne de 18% (avec des pics à 40 % selon les applications). Une évolution qui se fait au prix de fréquences revues à la baisse, cependant : 4,1 GHz en mode turbo pour le Core i7-1068G7 (le plus performant des CPU Ice Lake qui entrera en production en fin d’année), alors que la génération Coffee Lake/Whiskey Lake pouvait atteindre 4,8 GHz. C’est un signe qu’Intel se montre prudent, cherchant à maîtriser la fabrication à 10 nanomètres avant de pousser le curseur.

S’ajoutent des jeux d’instructions spécifiques pour accélérer le chiffrement et les routines d’intelligence artificielle (Deep Learning Boost). Selon Intel, les algorithmes d’IA basées sur des réseaux neuronaux pourraient être exécutées localement (sur le PC) 2,5 fois plus vite. Voici qui promet d’améliorer la reconnaissance vocale ou la classification d’images, même à l’écart du cloud et de sa puissance quasi sans limite. On constate également l’intégration native du Wifi 6 (802.11 ax) et de quatre ports Thunderbolt 3.

Les CPU Ice Lake sont gratifiés de la nouvelle micro-architecture Sunny Cove : cache plus abondant, jeux d’instructions spécifiques pour l’IA… Le nombre d’instructions par cycle progresse de 18 % en moyenne

Mais le plus gros morceau est assurément le nouveau circuit graphique intégré, fondé sur le moteur graphique Gen 11. Dans sa version la plus performante – les références qui se terminent par G7 – l’Iris Plus (marque existante au logo modifié pour l’occasion) est doté de 64 unités de calcul, avec une fréquence maximale de 1.1 GHz.

En comparaison, la précédente génération Gen 9 (Intel semble fâché avec les chiffres) n’en comptait que 24, à fréquence comparable ou légèrement supérieure. Selon Intel, les calculs en virgule flottante réalisés par ce moteur graphique Gen 11 franchissent désormais le téraflop, en 32 bits, et le double téraflop, en 16 bits. Autres attributs intéressants : la compatibilité Adaptive-Sync, pour supprimer le tearing de l’image, et la prise en compte de la 4K/120 Hz ou de la 5K/60 Hz.

Le circuit graphique Gen11 surpasse son prédécesseur

Si l’on additionne le nouveau contrôleur mémoire, capable d’adresser de la DDR4-3200, un gain de performances significatif est envisageable… et vérifié par les premiers benchmarks : le Core i7-1065G7 et son circuit Iris Plus surpassent le Core i7-8565U accompagné d’un circuit UHD 620, un processeur équivalent de la précédente génération, tant d’un point de vue énergétique (15 ou 25 watts) que tarifaire.

Pour la plupart des jeux, le nombre d’images par seconde est doublé voire triplé. Certains jeux deviennent même jouables sans carte graphique du coup, c’est-à-dire qu’ils affichent plus de 30 ips, alors qu’ils ne l’étaient pas auparavant. Dans certains cas, l’Iris Plus Gen11 égale même une carte graphique dédiée comme la GeForce MX250. Ses résultats s’approchent par ailleurs de ceux obtenus par le circuit Vega 10, associé au Ryzen7-3700U d’AMD. Côté multimédia, le temps d’encodage d’une vidéo en HEVC serait également écourté de moitié, d’après Intel.

A première vue, la génération Ice Lake s’annonce comme une réussite. Encore faut-il en préciser les contours. Oui, il sera possible de jouer à des titres âgés de quatre-cinq ans ou à un Fortnite en 1080p avec une bonne fluidité (au-dessus de 30 ips) et un niveau de détails tout à fait honorable. Mais il est vain d’espérer autant avec un Battlefield 5 ou un Metro Exodus, à moins de revoir la définition et les effets graphiques sérieusement à la baisse.

Jouer aux meilleurs jeux avec un nombre d’images par seconde multiplié par deux, certes… mais ça ne signifie pas qu’ils sont jouables pour autant.

Ensuite, les Ice Lake les plus rapides, par conséquent les plus chers, se destinent à des ultra-portables entre le milieu et le haut de gamme (1000-1200 €). A ce prix, un PC portable gamer avec circuit graphique dédié, qui certes accuse un kilogramme de plus sur la balance, permet de jouer dans de bien meilleures conditions. Enfin, tous ces benchmarks préliminaires sont à nuancer, pour le meilleur ou pour le pire.

Une première impression positive mais à nuancer

Pour le meilleur, les pilotes graphiques sont loin d’être optimisés, les machines n’étant même pas encore vendues. Pour le pire, les premiers tests ont été effectués avec la version la plus flatteuse d’Ice Lake. Soumis aux mêmes épreuves, un Core ix-10xxG1, dont le circuit graphique n’est pas un Iris Plus, n’obtiendra pas des scores aussi spectaculaires. D’autre part, quelques CPU Coffee Lake pour PC portables (puissance de dissipation thermique max de 28 watts) parmi les plus récents sont associés à un Iris Plus 655 (Gen 9.5), avec 48 unités de calcul. On présume que l’écart avec l’Iris Plus Gen11 sera moindre.

Quant à la comparaison avec le Vega 10, l’arrivée l’an prochain de l’APU Renoir d’AMD pourrait rebattre les cartes, bien que l’on ne sache pas si le circuit intégré sera de nouvelle génération ou non.

Mais Intel, de son côté, ne restera pas les bras croisés et annonce déjà que Tiger Lake, la future révision d’Ice Lake, embarquera un circuit graphique deux fois plus performant ! On ignore qui emportera la bataille, mais l’amateur de jeux vidéo ne peut que se réjouir de cette émulation. Plus vite qu’il ne le pense, il pourrait profiter des jeux les plus exigeants en tout fluidité sur son ultra-portable d’un kilo.