Microsoft ne la joue plus perso ?

L’ancien patron de Microsoft, Bill Gates avouait récemment que sa plus grosse déception avait été de rater le train des smartphones. Satya Nadella, à la tête du géant américain, espère ne pas rater le nouveau marché prometteur : le cloud gaming. Il se donne toutes les chances de son côté en s’alliant notamment avec… Sony.

Le business model de Microsoft repose sur trois piliers principaux. Premièrement, « Cloud-first, mobile-first ». Le cloud est devenu le principal moteur de l’éditeur qui est persuadé de l’évolution de l’informatique professionnelle : le on-premise (en gros, les logiciels qu’on installe sur chaque poste de travail) sera réservé à quelques applications métier spécifiques ou sensibles.

Tout le reste sera dans le cloud (avec notamment les applications en mode SaaS – « software as a service »). Pari réussi ! Microsoft a réalisé un chiffre d’affaires de 26,7 milliards de dollars en 2018 alors que les revenus d’Amazon n’ont atteint que 23,4 milliards de dollars.

La partie « Mobile-first » ne signifie pas que Microsoft va retenter sa chance pour rattraper Android ou iOS. Il s’agit, cette fois, d’accompagner la mobilité des entreprises.

Datacenters et latence

Le second pilier de sa croissance repose sur les fusions et acquisitions. L’année dernière, Microsoft s’est offert une quinzaine de sociétés allant des producteurs de jeux vidéo à l’intelligence artificielle. Il a notamment récupéré Mojang Synergies AB, le développeur suédois de jeux vidéo de la franchise Minecraft, pour 2,5 milliards de dollars.

Dernier pilier, la réalité augmentée et virtuelle (RV) en misant sur le potentiel de HoloLens.

Entre le cloud et la rente que représentent (toujours) Office et Windows, il n’y a pas photo : le jeu vidéo rapporte beaucoup moins. N’empêche, Microsoft continue à suivre ce marché pour ne pas être distancé. Il a ainsi fait une démonstration en direct de son prochain service de streaming de jeu Project xCloud. Il était possible de jouer à Forza Horizon 4 sur un Galaxy S9 relié à une manette Xbox.

Ce service, qui permettra de jouer à un jeu en continu sur ordinateur, consoles et appareils mobiles, va subir différents essais publics en 2019. L’éditeur a aussi développé du matériel sur mesure pour ses datacenters et a travaillé sur l’encodage/décodage. Objectif : optimiser son service (notamment au niveau de la latence) pour convaincre les joueurs du monde entier.

Mais le plus surprenant est l’accord entre Microsoft et… Sony. Même si son service PlayStation Now est le plus grand opérateur de cloud gaming avec une part de marché mondial de 36 %, Sony ne maîtrise pas parfaitement l’infrastructure cloud. C’est justement l’un des points forts de Microsoft. L’accord porte justement sur l’utilisation par Sony du cloud Azure de Mircosoft ainsi que sur ses solutions en matière d’Intelligence artificielle afin d’améliorer l’expérience des joueurs.

Publicité ciblée

En s’alliant avec Microsoft, le Japonais Sony espère optimiser son service sur le cloud. ©Sony

Cette alliance témoigne aussi de la montée en puissance de la concurrence. Tout le monde sait que Google ne veut pas jouer les seconds couteaux. Mais il n’est pas le seul. Il y a aussi NVIDIA avec son GeForce Now, Shadow et Liquid Sky. Et on se demande ce qu’attend un autre géant pour se lancer : Amazon. Il affiche en tous les cas une solide expérience en matière d’infrastructure cloud…

L’accord entre Microsoft et Sony ne sera certainement pas simple dans les détails. Quid notamment du partage des revenus et des licences. Car, justement à propos des revenus, le cloud gaming va révolutionner le secteur avec de la publicité ciblée. Impossible lorsqu’on vendait des jeux sur support physique d’adresser des messages personnalisés.

Avec le cloud gaming, les grands gagnants seront ceux qui maîtrisent le cloud, les jeux et la publicité. Autant dire que le deal entre Microsoft et Sony va donner des idées à d’autres.