Tencent, l’empire tentaculaire du (milieu du) jeu vidéo

Le Japon fait des consoles et de bons RPG, les USA les talonnent, l’Europe montre sa créativité du côté du développement, les joueurs coréens performent… Il va falloir revoir sa géographie du jeu vidéo car c’est aujourd’hui un peu plus compliqué que ça puisque le géant chinois Tencent ne semble plus vouloir s’arrêter…

La Chine est un nouveau vecteur de croissance et intéresse les professionnels du jeu. Ubisoft a annoncé d’importants partenariats avec Tencent.

Le GAFA, constitué de Google, Amazon, Facebook et Apple, domine le monde numérique. Son équivalent chinois est le BAT pour Baidu, Alibaba et Tencent.

Ce triumvirat est composé, dans l’ordre, d’un moteur de recherche, d’un site de vente en ligne et d’un éditeur spécialisé dans les services Internet, les messageries et les jeux vidéo. On comprend alors combien le protectionnisme chinois était à la faveur de ces sociétés qui copiaient le modèle américain et connaissaient les mêmes courbes de croissances, mais dans un pays comptant 4 fois plus d’habitants/consommateurs dont le niveau de vie n’a cessé de progresser.

Aujourd’hui, l’ouverture des marchés profite à l’empire du Milieu qui n’hésite plus à investir dans des entreprises du monde entier. Tencent est peu à peu monté dans le capital de l’éditeur Riot jusqu’à s’offrir les 100 % à la fin 2015. Il est ainsi devenu propriétaire de League Of Legends. En juillet 2016, il sort la bagatelle de 8,6 milliards de dollars pour mettre la main sur le finlandais Supercell et donc deux des fleurons du jeu nomade, Clash of Clan et Clash Royale.

La zone Asie-Pacifique représente 51.2 milliards de dollars de revenus, soit 47 % du marché mondial. Les MOBA et PUBG connaissent un vif succès sur ces territoires.

Non content de valider de belles opérations de fusion/acquisition, Tencent édite ses propres jeux. Parmi eux, l’excellent MOBA Honor of Kings, appelé chez nous Arena Of Valor, arrivé en tête des titres mobiles les plus joués au monde durant l’été 2017 devant Clash of Clans (3e) et Clash Royale (5e). Trois hits dans le top 5. L’éditeur chinois a beau être un nouveau venu dans l’univers du jeu, il n’a rien d’une jeune pousse. Avec le succès de PlayerUnknown’s Battleground, des rumeurs de rachat ont un temps tourné ; mais Tencent devra se « contenter » d’être le partenaire privilégié pour la diffusion du jeu en Chine et édite d’ores et déjà annoncé la version mobile.

Tencent, plus valorisé que Facebook

Le BAT n’a rien d’une pâle copie du GAFA. En 2017, Tencent devenait la seule entreprise non américaine à entrer dans le club des 10 sociétés les plus cotées au monde. Au premier semestre, la hausse du bénéfice net était de 70 %, puis Tencent a annoncé une croissance de 84 % sur le secteur mobile au troisième trimestre, rien que ça !

Début janvier, sa capitalisation dépasse celle de Facebook avec pas loin de 550 milliards de dollars. L’éditeur chinois est donc, tout simplement, le leader devant Sony, Activision-Blizzard et Microsoft. Mais plus qu’un portefeuille, il lui faut aussi un catalogue. De nombreux investissements sont lancés dans des sociétés du secteur. Tencent détient ainsi 40% d’Epic Games (moteur Unreal, Fortnite), 9% de Frontier (Elite Dangerous, Planet Coaster), 5 % de Paradox Interactive (Cities : Skyline), 5% d’Activision Blizzard (Call Of Duty, Overwatch), etc.

Des partenariats stratégiques

Tencent s’offre aussi des exclusivités locales comme un Call Of Duty On line, ou le développement de Might & Magic Heroes : Era of Chaos en collaboration avec Ubisoft. Ce dernier a dans le même temps lancé un partenariat stratégique pour diffuser les jeux mobiles Ketchapp (l’une de ses filiales récemment acquises) sur le service de messagerie WeChat appartenant à… Tencent, évidemment.

Ce mois de janvier, c’était au tour du géant Lego d’annoncer un accord afin de donner un coup de pouce à Lego Boost, le système qui permet d’animer les constructions, et d’assurer le développement d’un réseau social nommé Lego Life.

Un nouveau marché d’applications

Si Tencent est déjà le plus gros éditeur de jeux, il est loin d’avoir atteint sa vitesse de croisière. Ce géant prospère dans d’autres industries comme Tencent Vidéo, un équivalent local de Netflix qui compte pas moins de 43 millions d’abonnés, mais aussi dans le paiement électronique, la messagerie instantanée, etc. De plus, il continue d’investir ou de lancer des partenariats avec de grands groupes comme Tesla, Carrefour et bien d’autres.

Mais le plus important dans le domaine du jeu est peut-être à venir : le lancement d’une plateforme d’achat à l’international pour concurrencer Steam. WeGame, c’est son nom, compte déjà plus de 200 millions d’utilisateurs actifs. Le déploiement mondial prend du temps, mais il pourrait causer une énorme déflagration sur l’industrie du jeu vidéo.