Unreal Engine 5 : un tigre dans le moteur

La présentation d’un moteur de jeu devrait avant tout intéresser les développeurs. Toutefois, les révélations autour de l’Unreal Engine 5 en disent long sur l’avenir de notre média, les rendus dont nous allons profiter, les capacités de nos machines à faire tourner les prochains grands hits. Voici donc un avant-gout d’une nouvelle forme de next gen.

Epic nous présentait il y a un an le rendu de son futur moteur. Une superbe démo, avec une gestion de la lumière très impressionnante, mais qui en soit ne révélait pas grand-chose sur ce que l’Unreal Engine 5 allait changer dans l’industrie du jeu. Ça restait une démo… L’application est désormais arrivée en early access et l’éditeur a dévoilé il y a quelques semaines de nouvelles images avec cette fois quelques explications de texte. Il y a beaucoup à en dire, avec évidemment un peu de jargon, mais nous allons déchiffrer cela ensemble.

La vidéo présente le rendu sur les consoles next gen et le PC. Plusieurs développeurs se sont emparés de l’early access pour s’assurer que la démo tourne en effet sur des configurations « raisonnables ».

La vallée des anciens : un choix pas si anodin

Nous ne sommes pas là sur une technologie, mais sur le nom de la séquence de démonstration effectuée par Epic. En soi, rien d’extravagant, il s’agit d’un décor extérieur éclairé par une lumière naturelle. Mais elle en dit long sur l’ambition de l’éditeur. Ce Valley of the Ancient est un clin d’œil envoyé aux développeurs sur la capacité à gérer un monde ouvert. Chacun des éléments dévoilés démontre que l’UE 5 peut assouvir les rêves de grandeurs des éditeurs tout en leur facilitant le travail. En revanche, nous sommes pressées désormais de voir comment UE5 se défend en intérieur.

Lumen : technologie d’éclairage globale

Pour les anglophiles, voici l’analyse de Digital Foundry, un site indépendant. Les présentateurs ne tarissent pas d’éloges sur le moteur et imagine les perspectives dans le jeu, mais aussi le cinéma et la VR.

La gestion de la lumière est l’un des enjeux du moment pour les développeurs ainsi que les vendeurs de consoles et de cartes vidéo. Avec Lumen, le Ray-Tracing s’invite en software dans le moteur de jeu. Il suffit donc de placer une source lumineuse (ici, tout simplement la position du soleil) pour que toute la lumière soit calculée en temps réel sur l’ensemble de la carte. Cette option demande de la ressource, mais la dernière génération de console ainsi que les PC équipés de GPU récents, de 16 Go de RAM et d’un SSD sont capables de proposer ce rendu. Et rappelons que nous sommes là sur un early access : l’UE va encore gagner en qualité et en performance.  

Nanite : Système de géométrie virtualisée

L’un des points qui ont le plus impressionné les développeurs et cette facilité à importer et travailler sur des objets très chargés en polygones conçus par des artistes 3D.

L’idée semblait irréaliste lors de la présentation de la première vidéo en 2020. Mais cette fois il ne s’agit plus d’une démonstration technique. Les faits sont là, le travail sur des éléments complexes est non seulement à la portée des configurations traditionnelles, mais il est en plus largement simplifié. En effet, le « popping », soit ce changement de détails en s’approchant ou s’éloignant du sujet, sera assuré par le moteur et cela de manière impressionnante à en croire les retours extatiques des professionnels. En écartant cette étape d’adaptation du lod (level of details) le boulot du développeur est plus rapide, mais le jeu gagne aussi en optimisation.

Temporal Super Resolution : Intimement lié au Nanite, il s’agit d’une technologie similaire au DLSS de NVIDIA ou le FSR (FidelityFX Super Resolution) d’AMD. À savoir, approcher d’un rendu 4K natif avec une résolution d’entrée en 1080p. En revanche, on ne sait pas comment tout cela va se lier aux solutions des constructeurs de GPU.  

Le moteur d’Epic n’est pas seulement voué aux jeux. Il est aussi un support pour le cinéma et les séries, l’architecture, etc. La gestion de la lumière et du photoréalisme va le rendre encore plus incontournable.

Full Body IK Solver et animation motion warping : il est cette fois question de donner des postures plus justes aux personnages de jeu. Par exemple, si votre héros doit enjamber un petit obstacle il n’aura pas la même série de mouvements que s’il doit passer au-dessus d’un élément bien plus gros. De la même façon, votre personnage fléchira un peu le genou ou inclinera totalement le corps en fonction des aspérités du sol. Peut-être n’aurons-nous plus l’impression qu’un personnage lévite à chaque fois qu’il monte un escalier !

Parmi les autres nouveautés, on note l’intégration de Bridge suite au rachat de la société Quixel. C’est ainsi une banque d’images gigantesque, réalisée par photogrammétrie, que l’on retrouve au cœur du moteur. Le Metasound offre aussi une optimisation de l’intégration sonore, même si UE4 était déjà excellent dans ce domaine. Le Sky atmosphere System propose des ciels et des nuages volumétriques réagissant parfaitement à la lumière ambiante. Ajoutez à cela toutes les améliorations d’interface, la facilité à opérer un travail coopératif sur un projet et vous comprendrez à quel point l’Unreal Engine 5 va faire évoluer cette industrie.

Le moteur sera disponible début 2022 et ce n’est pas dans les mois qui suivent que l’on verra arriver les AAA développés avec cette technologie. NVIDIA et AMD ont déjà fait part de leur enthousiasme quant aux perspectives de la puissance de leur carte sur un tel moteur, mais ce sont avant tous les développeurs qui ont marqué un fort contentement sur cette nouvelle mouture. Nous semblons partis pour une décennie de jeux de plus en plus beaux. Reste maintenant à se concentrer sur l’intelligence artificielle, la scénarisation, les dialogues, la traduction… tous ces points de crispations qui entachent encore trop souvent nos jeux…