par Denis P., chargé de contenus et passionné des contenants. Feu CM et héraut de la cuisine (ce qui n’a strictement rien à voir), il aime toucher à tout le High-Tech sans en être un technicien. A tout de même une forte propension à perdre son temps dans les photos et jeux vidéo.
Vous le savez, en 2017, vous allez devoir voter si vous avez plus de 18 ans. Mais aussi si vous êtes gamers. Créée dans une certaine indifférence en 2016, l’association France eSports, conçue pour structurer et organiser le secteur, ouvre en effet les adhésions à « l’ensemble des acteurs français, individuels, associatifs ou professionnels ». Les joueurs, même amateurs, sont (enfin) ainsi invités à prendre part aux projets qui les concerneront directement. Du moins sur le papier…
De loin, on pourrait croire à un mauvais feuilleton sur les affres de la « culture administrative » française mélangés à des luttes de pouvoir et une apparente volonté de bien faire les choses mais de louper… Dis ainsi, cela peut paraître bien négatif mais c’est l’impression peu ragoutante que laisse la 1ère année d’existence de l’association France eSport. Celle-ci se termine donc par l’ouverture de la structure au plus grand nombre en vue de l’élection du nouveau conseil d’administration qui aura lieu en juin. Depuis le 20 avril, vous pouvez donc vous inscrire en tant que particulier à cette structure, ce qui vous permettra de participer à l’élection d’un « collège de joueurs ». Je vous sens ultra motivés et enthousiastes… Mais il serait dommage pour tout aficionado d’esport de regarder le train passer sans tenter quoi que ce soit.
Reprenons les choses dans l’ordre (et brièvement car je sens sinon que je vais perdre les derniers).
Il y a près d’un an, dans le cadre de la Loi pour une République numérique (promulguée le 8 octobre), la ministre de la Culture, Axelle Lemaire, reçoit un rapport sur le développement de l’esport. Conscient du phénomène grandissant, plusieurs propositions sont soulevées pour principalement sécuriser, clarifier et encourager le développement du jeu vidéo compétitif. Le mot esport est lui-même reconnu (wouhou) et les premières mesures aboutissent à la création de France eSport. Voici ce qu’indique l’article 1 de ses statuts qui souligne l’objectif de l’association :
« L’Association FRANCE ESPORTS a pour objet de représenter les intérêts communs des agents économiques, professionnels ou amateurs, du secteur des sports électroniques, ainsi que de développer, promouvoir, encadrer la pratique des sports électroniques dans un esprit d’équité et d’épanouissement humain, s’inscrivant dans les valeurs et les principaux fondamentaux de l’Olympisme » (voir les statuts).
Une bonne chose avait-on été tenté de dire : après tout, nous les amoureux du gaming ne pouvions que nous réjouir de plus de reconnaissance, d’encadrement pour les joueurs (à leur avantage) et les événements… Pourtant, rapidement, quelques doutes ont émergé.
En France, on aime bien les strates donc sous quelle égide placer cette fédération ? Le CNOSF (Comité national olympique et sportif français) car l’esport serait proche du sport classique (dans son fonctionnement) ? Il a refusé. Le ministère du sport n’aurait pas été très tenté non plus. Et puisque l’on parle aussi des récompenses financières des tournois, le ministère de l’intérieur « aurait repris la main » selon les mots du secrétaire général Stéphan Euthine.
Quel avenir ?
Face à l’éclatement du monde du gaming, c’est donc l’association France esport qui a été créée pour pousser la discipline. Et parmi les 10 membres fondateurs, que du lourd et des représentants d’organisation pas toujours bien vues par les joueurs : le Syndicat des Editeurs de Logiciels de Loisirs (SELL), le Syndicat National du Jeu Vidéo (SNJV), ESL, ESWC mais aussi Oxent et Webedia… Aucun joueur dans cette équipe de départ et des personnes morales à même d’être considérées comme juge et partie, Webedia et Oxent étant détenus par la même société par exemple. Les représentants de ces deux entités ont même démissionné en août 2016 mais leur décision a été… refusée par le conseil d’administration !! Quand on vous dit que cela ressemble à un mauvais feuilleton.
Car pendant ce temps, que s’est-il passé pour les joueurs et le milieu du esport ? France eSport n’a pas pu répondre à nos questions. Et à en croire la récente interview de l’avocate de l’association, Aurore Huet, « c’est […] encore insuffisant ». Le statut des joueurs professionnels et la fiscalité des cashprizes font partie des premières pistes. Et les chantiers suivants sont définis :
– Rendre compétitives et efficaces les modalités d’application du contrat de travail pour les joueurs professionnels
– Définir un cadre légal pour l’organisation de tournois de jeu vidéo en ligne avec espérance de gains
– Permettre la diffusion des compétitions de jeu vidéo en télévision dans conditions équivalentes aux sports traditionnels
– Elaborer une charte universelle du sport électronique inscrivant définitivement sa pratique dans l’histoire du sport
– Créer une plateforme d’échanges entre tous les acteurs économiques des sports électroniques, à travers ses collèges, afin de permettre un développement équitable et durable de l’ensemble de la filière
Vaste chantier qui ne semble donc ne pas avoir avancé.
Mais à partir du mois de juin, la gouvernance va changer et VOUS pourrez y contribuer. Un petit peu. Après le vote du mois de juin, France eSport sera « piloté » par 3 collèges dotés de quatre représentants chacun : le collège des promoteurs (organisateurs, médias, équipementiers…), des créateurs et éditeurs de jeu et celui… des joueurs. Le vôtre. L’adhésion à titre individuel est gratuite. Lorsque l’on constate la mauvaise pente que prend la structure, si l’on en croit toujours Stéphan Euthine (voir cette interview), autant faire entendre sa voix pour ne pas que l’avenir du eSport échappe aux joueurs…