Et si les jeux rapportaient de la cryptomonnaie ? Et si les gloires au combat et les objets glanés sur les champs de bataille numérique étaient échangeables contre de l’argent sonnant et trébuchant ? Et si Ready Player One ne tenait déjà plus de la science-fiction ? Et si…
Et si on arrêtait de s’emballer et que l’on évoquait l’un des derniers jeux blockchain à avoir fait sensation : Cryptokitties. Oubliez l’héroïc fantasy, les héros charismatiques, les combats épiques, il s’agit d’un clone de Tamagotchi où l’on élève des chats… Passionnant !
Et pourtant ces cyberfélins ont attiré un si large public que l’on compte aujourd’hui plus de 100 000 représentants de cette espèce dont certains s’échangent à prix d’or. Le pompon étant attribué à Genesis, mignon mironton cédé au doux tarif de 247 Ethers soit 115 000 dollars, litière comprise.
Les blockchains en dehors de la finance
Traité ainsi, le sujet prête à rire, mais ces chats expriment un désir que connaissent bien des joueurs ; la propriété d’un asset et la possibilité de revente dans et en dehors du jeu. Le système de blockchain permet d’organiser ce processus économique et va peut-être, à ce titre, révolutionner le secteur.
Il faut pour cela une concordance de plusieurs éléments.
Déjà, un éditeur doit élaborer une plateforme en ligne dans laquelle il inclut une monnaie virtuelle ; Bitcoin, Ether, Brouzouf… peu importe. Les jeux amenés par différents développeurs et cette masse monétaire constituent une base de données (la blockchain), transparente et inviolable, constamment partagée et modifiée par les utilisateurs. Ça reste flou ? Prenons l’exemple pour l’instant fictif de l’excellent Witcher 4 (il le sera) acheté 100 Brouzoufs sur la plateforme Lambda. Après une centaine d’heures passée à jouer, vous accumulez plusieurs armures exclusives. Toutes sont répertoriées sur la base de données de Lambda et vous en êtes le propriétaire authentifié. Vous décidez d’en vendre quelques-unes. Les Brouzoufs récupérés pourront être dépensés dans le jeu, dans un autre titre de la plateforme Lambda ou échangés contre des euros !
Autre perspective alléchante : le simple fait de jouer fait miner l’ordinateur et rapporte quelques Brouzoufs supplémentaires. Être payé pour jouer, un rêve ! Mais ce n’est là qu’une petite illustration de tout le potentiel des blockchains. Prize pools, sponsoring, esport, financement se feront en cryptomonnaie. Bienvenue dans la « cyber économie réelle ».
Une nouvelle chimère ?
C’est tentant sur le papier, mais ce n’est pas encore pour demain pensent les grognons (si, si, on vous entend). Erreur !
Depuis le 23 mars, la plateforme Chimaera a ouvert ses inscriptions et ne manque pas d’argument pour séduire les joueurs. En premier lieu une économie tangible, le minage et la propriété des objets gagnés ou achetés, comme nous venons de le voir, mais aussi un aspect communautaire poussé, des univers en totale autonomie ainsi que des tournois multijoueurs.
Côté développeur, la promesse est tout aussi alléchante. D’abord la facilité d’intégration de jeux conçus sur Unity ou Unreal Engine dans l’écosystème Chimaera. Le coût du serveur réduit à zéro, puisque la blockchain en fait l’abstraction. Une monétisation gérée par leur soin : vente de jeu complet ou de contenu, système d’abonnement en cryptomonnaie, et surtout des récompenses aussi valorisantes pour l’égo du joueur que pour son portefeuille. Chimaera ne part pas de rien : en 2013, avec Huntercoin, la plateforme avait lancé un MMO qui reposait sur la blockchain.
Il faut encore du temps, des sociétés innovantes, et enfin l’entrée en scène d’une locomotive (Valve, Tencent,… ?) pour saisir le concept et les enjeux des jeux blockchains, évaluer la rentabilité potentielle pour les joueurs et le matériel nécessaire. Il pourrait toutefois s’agir d’une évolution aussi majeure que le web ou les réseaux sociaux. Ce système va faire naître des modèles économiques fascinants dont nous sommes pressés de voir les évolutions.