Après tant d’attente, de dates repoussées et de marketing, Cyberpunk 2077 ne pouvait que provoquer des sentiments mêlés. Et après de nombreuses heures à arpenter Night City, le verdict est encore plus clair : le bébé de CD Projekt est difficile à juger alternant l’excellent au très mauvais. Voir un environnement magnifique et un scénario puissant se mêler à des bugs dans tous les sens et un gameplay parfois mou et brouillon nous amène à une conclusion rapide sans spoil : Cyberpunk 2077 est énervant !
Ce qu’on pense de Cyberpunk 2077
Une fois n’est pas coutume, nous n’expliquerons pas l’histoire de V et le contexte autrement que par « regardez la bande-annonce » et « no spoil », car la narration est la qualité majeure du titre, et il est hors de question de la déflorer. Et puis il y a déjà tellement de choses à écrire sur Cyberpunk.
Soulignons qu’au contraire des rédactions spécialisées qui ont dû jouer ad nauseam pour explorer tous les rouages du jeu, nous avons gardé une approche plus grand public. Après de nombreuses heures passées dans Night City, nous avons la sensation d’avoir parcouru un jeu pour l’instant malade, mais contenant un grand nombre de moments époustouflants. Il souffre d’un défaut majeur des mondes ouverts : la garniture indispensable à mettre autour des quêtes principales et annexes.
Même si l’architecture de Night City impressionne sans cesse, on en vient presque à regretter de ne pas l’avoir eu façon Mass Effect avec une succession d’endroits fermés qui, bien exploités, donnent l’impression de parcourir l’univers tout entier. La ville où évolue V déçoit d’ailleurs un peu côté exploration au début puisque sa verticalité n’est là que pour nos yeux : nombre de bâtiments sont inaccessibles, les portes fermées.
Il souffre aussi à coup sûr pour certains joueurs de ne pas questionner les enjeux du Cyberpunk alors que beaucoup attendaient une leçon à la Philip K. Dick. « Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? » (Ndlr : titre original du livre Blade Runner), vous n’aurez aucune réponse.
De notre côté, ce n’est pas gênant, arriver dans cette architecture folle nous a suffi. L’histoire est réellement prenante, les personnages bien campés (Ohhh Jackie).
La bande-annonce en dit long. Une narration impeccable avec une mise en scène stupéfiante, des phases de combats à mettre au second plan et une conduite en deux roues à privilégier…
Côté combat, nos tentatives d’infiltration virent souvent au gunfight, et cela ne semble pas venir de la constitution de notre personnage (que vous pouvez façonner avec différentes options et points forts, comme un semblant de RPG). En l’état, le jeu de tir mêlé au piratage revient très souvent, trop souvent, l’IA parfois limitée de nos adversaires ne rendant pas les choses très immersives. Dommage car la vue subjective choisie par CD Projekt, différente des habituelles vues FPS, participe beaucoup à cette immersion qui se retrouve quelque peu gâchée par ces séquences. Surtout quand les bugs viennent s’en mêler…. (voir plus bas).
La conduite est encore plus hasardeuse. En somme, c’est sûr que si vous vous attendez à trouver Doom pour les phrases de tir, UFC en combat rapproché, Forza Horizon en voiture, alors vous espérez une chimère et vous serez déçu.
Mais nous reviendrons sur le sujet… Pour l’instant ; la configuration.
Configuration minimum pour Cyberpunk 2077
Cyberpunk 2077 is the new Crysis ! La configuration de base recommandée par CD Projekt est une blague :
- Processeur : Intel Core i5
- Carte graphique : GTX 780 ou Radeon RX 470
- Mémoire : 8 Go de RAM
Si vous voulez passer à côté d’un titre dont l’univers visuel est une qualité majeure, il n’y a pas mieux !! On ne mettra pas ici les images PS4 qui tournent sur Twitter mais cela fait peur !
L’Altyk Omega avec son Core i5, sa RTX 2060 et ses 16 Go de RAM rendent davantage justice aux lumières et à cette ville fourmillant de détails. L’une de nos configurations de test (Ryzen 7 2700x + RTX 2060) nous a permis de nous balader en réglages ultra, DLSS en mode équilibré ou qualité avec 60-70 FPS. Évidemment, on a voulu goûter le RTX. Certains vont encore critiquer le peu de différences qu’il amène mais, comme dans un bon film, ces détails en plus sont vraiment magnifiques. Mais sur la même configuration, ils amènent à près de 20-25 FPS de moins !!! Cela fait cher « payé ». Résultat, nous avons fait l’impasse sur le RTX, y compris sur des PC de test équipés en 2080, mis à part pour quelques cinématiques histoire d’en profiter.
Entendons-nous bien, une carte de la série 10 s’en sortira avec les honneurs au prix de quelques concessions, mais Night City est un élément si important que passer à côté d’une 2K fluide, du RTX et du DLSS altère un peu l’expérience.
Pour les anglophiles, ou simplement pour regarder les images capturées par l’excellent site Digital Foundry ; le jeu est testé sur plusieurs configurations avec à chaque fois l’indication du nombre d’IPS.
Quelle configuration PC pour jouer à Cyberpunk 2077 ?
Pour bénéficier pleinement de Cyberpunk 2077, on ne peut que conseiller de sortir la grosse artillerie, à savoir une configuration équivalente à notre Hellfire :
- Processeur : Intel Core i7 10700k,
- Carte graphique : GeForce RTX 3080
- Mémoire : 16 Go de RAM
Cela offre une 2K (WQHD) impeccable mais une 4K qui peine à dépasser les 50 FPS (ce qui en soit, reste TRÈS jouable).
Config Cyberpunk 2077 4K
Cyberpunk 2077 va donc devenir le jeu préféré pour les benchmarks 4K, car la machine capable de le hisser bien au-delà des 60 ips n’existe pas encore, sauf à s’y rapprocher en y laissant toutes ses économies :
- Processeur : Intel Core i9 10900K
- Carte graphique : GeForce RTX 3090
- Mémoire : 32 Go de RAM
Précision important à nos yeux : Cyberpunk 2077 se drape d’un filtre visuel qui ne rend pas hommage aux graphismes PC. L’application de ce petit reshade vous fournira une image bien plus jolie selon nous 🙂
Quid des bugs ?
Bizarrement, il semble que chaque joueur ait sa propre expérience face aux bugs.
Chez l’un d’entre nous, ce fut le festival du « air ». Les PNJ fument « des air-cigarettes », en mangeant des « air-sandwichs » et vous tendent des mains vides lorsqu’ils sont sensés vous donner quelque chose. Nous avons aussi eu droit à des appels où votre correspondant, plutôt que de rester en visio, popait devant vos yeux, en lévitation. Beaucoup rencontrent aussi des soucis de binding des touches qui ne fonctionne pas toujours…en 2020…
Le ragdoll quand les PNJ meurent est souvent absurde, il ne pas rare de voir des passants se fondre dans le mobilier urbain, des passants apparaître au dernier moment, des dialogues tourner en boucle alors que leurs auteurs sont passés de vie à trépas rapport aux quelques coups qu’on leur a asséné… Bref, c’est franchement un festival et si Night City n’était si joli et Cyberpunk si prenant, on crierait au scandale. Après avoir tant repoussé le jeu et vu le prix de vente, c’est dur à accepter.
Heureusement, nous n’avons eu qu’un seul bug bloquant. Un PNJ restait inerte alors que le déclenchement de son script était indispensable pour poursuivre l’aventure… Merci la progression souvent sauvegardée.
À l’affirmation « Cyberpunk n’est pas un jeu fini », nous ne pouvons qu’acquiescer, mais il n’y a rien d’irréversible pour les bugs visuels.
Emballement médiatique et réactions en chaine
Là encore il y aurait tant de choses à écrire, mais nous allons nous en amuser. Influenceurs et journalistes se sont retrouvés face à une belle mariée avec une tâche de gras sur la robe. Certains s’extasiaient devant autant de charme, pendant que d’autres affirmaient « oui, mais la tâche est quand même bien dégueulasse ». Vous l’aurez compris, la mariée c’est le côté narratif de Cyberpunk, la mise en scène, l’histoire, les doublages (français et anglais), l’architecture de Night City. Et il y a toutes les raisons de s’enthousiasmer. La tâche, ce sont les bugs omniprésents, un inventaire et une carte surchargés, des choix qui n’influent pas grandement sur l’histoire principale et une IA parfois aux fraises.
Surtout, on a l’impression qu’à avoir voulu condenser tout le meilleur du jeu vidéo, CD Projekt échoue quelque peu : Night City n’offre pas les sensations d’un open world comme GTA ou RDR2, il offre des phases de tir mais aucune sensation de FPS, la conduite est toute aussi molle, le Loot tellement omniprésent qu’on finit par s’y perdre et le côté RPG des capacités de V est tout aussi lisible que l’inventaire ou la map, c’est dire !
Il n’y a pas de « qui a raison, qui a tort », tout est question de point de vue. Les notes extatiques sont excessives, on ne peut décemment trouver irréprochable un jeu qui sort dans cet état. Mais descendre en flèche un travail de titan sans voir ce que le jeu propose n’est pas cohérent non plus.
Après tant de hype, il faudra sans doute du temps pour revenir à la modération. Nous-mêmes, nous réagissons presque à chaud, et nous contenons une certaine colère à constater que CD Projekt a cassé notre jouet en livrant un travail non fini. Ils n’ont pas fait mieux qu’Ubi, Rockstar ou Bethesda et il y a de fortes chances que les prochains patchs améliorent grandement l’expérience mais pour nous ça sera trop tard.
Le conseil est souvent donné sur les réseaux sociaux et il est juste : si vous ne l’avez pas encore lancé, attendez tranquillement quelques temps. Déjà, les patchs sortis la semaine dernière améliorent l’ensemble : après tant d’années de développement, il aurait donc seulement fallu une semaine de plus ?!?
Le complexe du monde ouvert
Cyberpunk est un excellent moyen de réfléchir à ce que nous attendons d’un monde ouvert et là encore il va y avoir une réponse propre à chacun.
De notre côté nous espérons de la cohérence et de la crédibilité et cela semble de plus en plus inatteignable dans un milieu urbain moderne avec de la conduite de véhicules. Watch Dogs Legion était une catastrophe sur ce point, GTA V s’en sort bien lorsqu’on veut éviter le « Carmageddon » et Cyberpunk est entre les deux. Mais dans une volonté de Roleplay, le joueur qui cherche une immersion préfèrera (pour l’instant) les deux roues, les voyages rapides et la marche à pied. À quand une conduite semi-automatique à déclencher au bon vouloir du joueur ?
Autre question : comment donner de l’intelligence à une foule et/ou comment justifier des rues vides dans une mégalopole ? The Witcher, tout comme Red Dead Redemption voire Assassin’s Creed gardent une certaine cohérence (toute relative) parce que les PNJ ne sont jamais en grand nombre ou sinon dans des espaces à taille plus humaine. Cyberpunk s’en sort d’ailleurs bien dès que l’on se situe dans un endroit clôt. Mais comment recréer cette illusion à l’échelle d’une ville entière où des centaines d’habitants se croisent dans de vastes espaces ?
Nous n’avons aucune réponse ni aucune leçon à donner. En revanche, nous espérions en prendre une de la part de Cd Projekt et ce n’est pas le cas. Cyberpunk nous plonge dans l’univers incroyable de Night City quand on le regarde à l’échelle macro, mais si l’on s’avise de se concentrer sur les détails ou que l’on essaie de casser les mécaniques, il devient la Cour des Miracles.
Est-ce qu’il mérite pour autant la Vendetta des haters qui lui sont tombés dessus à bras raccourcis sans même y avoir joué ? Certainement pas. Est-ce que CD Projekt prend un coup de bâton justifié après avoir tenté de sortir son jeu sur les consoles les plus vendues du marché (PS4 et Xbox One) au mépris du résultat à l’écran ? Ça ne fait aucun doute. Et même si un patch vient sauver les meubles, le mal est fait. Un mauvais choix qui va leur coûter cher d’un point de vue image de marque.
Notre modeste conclusion
Après tout ce qui s’est passé autour du titre, il est dur d’émettre un avis définitif sans donner l’impression d’être dans une posture. Le plus sincèrement du monde, nous pensons qu’aimer Cyberpunk dépend de votre regard de joueur. Même lorsqu’il sera patché, certains n’apprécieront pas de se retrouver au cœur d’un film de 25 heures, aussi impressionnant soit-il au niveau de la narration.
Une fois les bugs écartés il faudra toujours, selon nous, composer avec une IA parfois pénible. De notre côté, ces défauts ne nous ont pas sortis de notre volonté de nous immerger dans Night City. Au-delà des crises de nerfs (et de rires) face aux finitions du jeu, nous vivons une expérience inoubliable.