Johanna Rolland : « la question du jeu vidéo n’est pas traitée à part »

Nantes est une ville où le numérique s’exprime pleinement. Par le prisme artistique et culturel mais aussi économique et sociétal. Membre de la French Tech, la ville accueille de nombreux événements dédiés au digital. Une situation qui doit beaucoup à sa maire, Johanna Rolland. Élue depuis 2014, cette Nantaise de naissance évoque pour nous son rapport au numérique !

Q : Être maire d’une ville estampillée French Tech vous amène-t-il à devenir plus pointue sur le High-Tech ?

Johann Rolland : Être maire d’une ville labellisée French Tech, c’est d’abord et avant tout s’attacher à mieux faire ensemble. C’est tout l’objectif de la dynamique collective enclenchée depuis le début de la démarche Nantes Tech, pour écrire avec les acteurs économiques et l’enseignement supérieur et la recherche une feuille de route partagée avec des objectifs très concrets : 10 000 emplois supplémentaires sur 10 ans. En 3 ans, 4077 emplois ont déjà été créés.

C’est aussi l’objectif de la Nantes Digital Week qui réunit depuis 4 éditions la grande famille du numérique à Nantes en co-construisant le programme de l’événement dédié à cette thématique, le plus important de France. Mais derrière cela, l’essentiel est de construire ensemble le sens que nous voulons donner au numérique : un moyen pour construire la société que nous voulons, une société plus juste, plus solidaire, plus durable.

Q : Comment continuer à inscrire Nantes dans le paysage numérique français et au-delà ?

JR : Si notre métropole est dynamique en termes de croissance d’emplois, c’est parce que nous avons la volonté de miser sur un tissu économique diversifié mais aussi de cibler un certain nombre de filières d’excellence dont le numérique fait partie.

À Nantes, le numérique va bien au-delà du tout technologique : ce sont des enjeux économiques, une question d’emploi, une manière dont on construit le territoire, un potentiel d’innovation qui touche aussi bien la culture, le patrimoine, les solidarités… Et les succès de la Maker Faire, du Web2Day, de la Nantes Digital Week, de Digital Change ou encore du Devfest le prouvent !

Pour cela, il nous appartient de soutenir les entreprises de croissance, la digitalisation de l’économie et de l’ensemble des outils de développement de notre métropole pour que nos entreprises, mais aussi nos établissements d’enseignement supérieur, nos associations soient à la pointe dans ce domaine. Il s’agit aussi de s’ouvrir à l’international, c’est le sens des coopérations engagées avec le Québec notamment pour accélérer les partenariats économiques. Les retombées de la mission inédite menée en 2016 (comme l’ouverture d’une filiale d’Obéo à Vancouver en 2017 ou la société TransWay qui prévoit une implantation à Montréal en 2018) témoignent de la fertilité de l’écosystème de la métropole Nantes Saint-Nazaire mais aussi de l’importance de son rayonnement en Europe et à l’international.

Nantes est une métropole ouverte sur le monde grâce notamment à ses acteurs de terrain, au premier rang desquels ses entrepreneurs. Pour toutes ces raisons, nous avons les ressources d’être une métropole qui compte à l’échelle européenne sur les questions numériques.

Johanna Rolland sur la scène du Web2Day (© William Jezequel)

Q : Depuis que vous êtes maire, avez-vous changé (ou pris) certaines habitudes « numériques » ? Quels outils High-Tech utilisez-vous au quotidien ?

JR : Le smartphone, c’est high tech ? 😉 C’est mon numérique au quotidien.

Q : Avez-vous des outils numériques professionnels et personnels ou les deux se confondent ?

JR : Pour être tout à fait honnête, je n’ai pas le temps de gérer des outils personnels. À travers mon compte instagram, je livre une partie des coulisses de mon quotidien et une lecture artistique de la ville.

Pour le reste, je rends compte de l’action que je mène avec mon équipe au quotidien à travers des outils de communication numérique mais aussi notamment au travers d’initiatives innovantes comme celles de rendez-vous originaux avec des habitants réguliers et de rencontres en appartements chaque mois.

Q : Vous êtes active sur Twitter, disposez d’un site Web à votre nom… Comment gérez-vous votre présence numérique ?

JR : Comme l’ensemble de mes communications, qu’elles soient presses, numériques ou relations publiques. Je veille à ce que chacune de mes prises de parole soient relayées sur l’ensemble de mes outils de communication pour m’assurer la diffusion de l’information au plus grand nombre.

Q : Comment vous servez-vous des réseaux sociaux ?

JR : Je les considère comme complémentaires. Si je vous disais que je suis capable de résumer une pensée politique en 280 caractères, vous ne me croiriez pas et ce serait sûrement un peu démagogique. Par contre, je suis assez convaincue que dans la durée, ils permettent de voir mes convictions et mes engagements.

Les personnes qui suivent mon actualité sur Twitter ne sont pas du tout les mêmes que celles avec qui j’interagis sur Facebook, notamment sur des problématiques du quotidien. Je suis interpellée tous les jours par des habitants, à la fois pour des problématiques personnelles mais aussi et surtout pour répondre à leurs questions sur Nantes et ses projets.

Q : Êtes-vous cliente du e-commerce ? Si oui, quel est le dernier article que vous acheté de cette façon ?

JR : Cela peut m’arriver. La dernière en date est une commande sur Green Shopper, une épicerie en ligne de produits en vrac créée par une Nantaise que j’ai rencontrée il y a quelques mois.

Q : Quel regard portez-vous sur ce secteur ?

JR : C’est un vrai sujet d’avenir. Le e-commerce modifie nos comportements et cela vient impacter notre manière de penser la ville (notamment sur les questions de logistiques urbaines) ou les commerces de proximité. Mais je crois qu’il ne faut pas opposer le commerce dit traditionnel et le e-commerce. Au contraire, il faut les penser comme complémentaires. Les habitants ont besoin de contacts physiques, ils me le disent tous les jours. C’est bien dans ce sens-là que nous travaillons avec la CCI aux côtés des commerçants du centre-ville.

Plongée dans la VR lors de l’événement Bibliothèque, la nuit »,

Q : Le jeu vidéo a eu une place à part pendant la Nantes Digital Week qui montrait toutes les facettes de la culture numérique. Pourquoi avoir créé un événement à part sur ce thème ?

JR : Co-construite avec les acteurs de l’écosystème numérique de notre grande métropole, la Nantes Digital Week propose depuis 4 éditions plus d’une centaine de rendez-vous sur différentes thématiques : art et patrimoine, culture scientifique et technique, éducation et jeunesse, égalité et accessibilité, économie et emploi, jeux vidéo et makers…

Vous le voyez, la question du jeu vidéo n’est pas traitée à part mais bien comme partie-prenante d’une programmation complète. Cette programmation propose aux habitants des temps de partages, de médiations et d’échanges autour des enjeux et de l’impact du numérique dans notre vie quotidienne : construire des territoires connectés et solidaires, contribuer à changer le monde dont les technologies numériques ont repoussé les frontières, toujours en prenant soin que personne ne soit exclu de cette aventure.

J’ai souhaité qu’un certain nombre d’événements porte sur les jeux vidéo. Nantes fait en effet partie des cinq places fortes du jeu vidéo en France et peut compter sur des acteurs comme Atlangames, Frag’n’Fun, Beat by 44 qui œuvrent sur ces questions au quotidien.

Q : Quelle place doit-il avoir dans la société ?

JR : Je suis convaincue que pour faire société, nous devons encourager les pratiques collaboratives et la réciprocité, et je crois que les jeux vidéo y contribuent. Mais nous devons être extrêmement vigilants aux questions d’addictions qu’ils peuvent générer et être très attentifs dès le plus jeune âge à équilibrer les activités, de la lecture aux activités manuelles, en passant par l’utilisation d’outils numériques de manière modérée.

Nous devons collectivement être vigilants à créer une culture commune sur ces sujets et non pas une fracture générationnelle supplémentaire.

Q : Êtes-vous vous-même joueuse ? Si oui, quel est le dernier jeu auquel vous avez joué ?

JR : Je n’ai vraiment pas le temps pour jouer. Je crois que je regrette encore le temps du « snake » sur mon 3310 !

Q : En tant qu’adulte, mais aussi maman, quelle place donnez-vous au jeu vidéo dans votre vie ?

JR : En famille, on joue au géocaching. C’est une belle manière de transformer les balades dominicales familiales en jeu de pistes. On prend autant de plaisir à chercher qu’à créer de nouveaux points de recherches.